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    C’est le monde…

     

    Elle ne sait pas entrer dans la ronde,
    Cette danse qui fait tourner le monde.
    Elle n’en a jamais connu les pas,
    Et la valse folle n’attend pas.

     Les yeux ouverts elle ne voit plus,
    Elle ne distingue plus les formes.
    Les choses, aux couleurs perdues,
    Se brisent, s’évaporent, se déforment.

     Que brille le soleil ou tombe la pluie,
    Les nuées se rassemblent, ténébreuses, sombres.
    Devant elle s’ouvre l’infini,
    Où, sans noms, sans visages, dansent les ombres.

     Il y comme du vide dans le plein,
    Comme de l’absence dans la foule.
    Il y a quand tout est là comme un rien,
    Et de l’indifférence quand tout s’écroule.

     C’est le monde des chemins sans fin,
    Des chemins de la solitude, de l’égarement.
    C’est le monde des nuits sans matins,
    Des nuies noires, épaisses, au triste firmament.

      © Charlène, le 9 septembre 2009

     


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  • © Charlène, 2008

     

    MELINA


    Fidèle depuis toujours, elle attend avec impatience que je quitte la table, signe que l'heure de nos longs moments privilégiés de chaque soir est arrivée. Je me masse le ventre et pose ma serviette sur la table. Connaissant chacun de mes mouvements, elle sait que le dîner touche à sa fin. Devant l'âtre de la cheminée elle s'étend. Quand elle me voit quitter ma chaise elle se hâte pour monter les escaliers et disparaît. Son habitude d'être là-haut la première me fait sourire. Je la suis lentement dans cette petite pièce qui n'appartient qu'à nous. Assise sur le bureau devant la fenêtre,  elle se trémousse d'impatience. Son pelage noir se confond au lourd manteau des nuits d'hiver. Je ne distingue d'elle que ses yeux ronds dont je ne saurais affirmer la couleur. Plus brillants que les étoiles, aussi ronds que la lune, je me perds dans cet océan d'or et d'argent. J'allume la bougie et m'installe. Comme tous les soirs, Mélina s'allonge sur mes livres les plus précieux comme la gardienne de nos trésors. Elle était présente à l'acquisition de chacune de ces merveilles. Elle est la « chatte noire du vieil écrivain du village », aussi célèbre que lui. Je ne peux m'empêcher de la mentionner dans mes écrits, c'est à elle que  je dois chacun de mes succès. Loin de me porter malheur comme le prétendent les superstitieux, elle est le cœur de mes souvenirs les plus doux. J'ai écrit mon premier roman en sa compagnie, et c'est avec elle que j'écrirai le dernier. C'est en elle que le soir, à la lueur des bougies, je puise l’inspiration. Elle est l'encre sans laquelle ma plume n'aurait aucune raison d'exister. Alors que j'entreprends l'écriture de nombreuses pages, elle commence sa longue toilette. Son ronronnement discret et le grattement de ma plume bercée par ce doux murmure ne font plus qu'un. Cette symphonie, promesse d'affection et de fidélité, s'élève dans le vieux grenier éveillant et gravant dans ma mémoire les senteurs d'anciens manuscrits humides, de cire fondue, de bouquets de lavande séchée que ma femme aimait tant. Le temps semble s'être arrêté. Pourtant Mélina me rappelle qu'il passe, elle se languit, se roule, m'implore. Je pose ma plume et la caresse. Je m'aperçois alors que ses grands yeux ronds ne sont plus que deux petites fentes dorées, Mélina s'endort. L'aube dépose sur son pelage noir les premières lueurs du jour. Je quitte ma plume sur le mot "fin" de mon roman achevé. Mélina le comprend. Elle me laisse quitter le grenier douillet sans crainte car nous savons tous les deux que les pages sur lesquelles jamais le mot fin ne sera inscrit, sont celles qu'écrit chaque moment passé ensemble dans cette pièce, notre île aux trésors, notre océan d'inspiration.

    ©Charlène, Mai 2008

     

     

     


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  • © 2008 Blank Studio and Gallery, Inc

    Pour l'extrait: © Charlène, 2009
    Pour le montage: © Sue2009

     

     

    Le sourire aux anges


    Par un mauvais rêve ton sommeil est troublé,

    Du fond de ton berceau tu commences à pleurer.

    Je m’approche de toi et te prends dans mes bras

    Puis je fais quelques pas, ton visage contre moi,

    Enfoui dans le creux de ma gorge, et ma main

    Caressant de ta tête le petit duvet brun.

    Que par le rythme des battements de mon cœur

    Et par une pluie de baisers cessent tes pleurs.

    Ton petit corps fragile lentement se détend,
    Lourdes deviennent tes paupières et tu attends
    Que les grands nuages blancs dans le ciel t’emportent.

    Tu te laisses aller et tu frappes à cette porte

    Qu’ouvre un petit être doré en souriant.

    Dans ton berceau je te repose doucement

    Et, émue, sur le côté la tête je penche.

    Le petit être dans sa belle tunique blanche

    Dans un univers de mille couleurs t’accueille,

    Et moi, sur tes lèvres un beau sourire je cueille.

    Mon beau, mon petit amour tu souris aux anges.

    Tout là-bas, au milieu de papillons oranges,

    De champs bleus, de ruisseaux verts et d’oiseau violets,
    Au-dessus des cailloux mordorés d’un sentier,
    Et dans la poussière d’étoiles qui dégringole

    Sur une boule de coton bleu tu t’envoles.

    Je te vois sourire dans ton sommeil mon ange.
    Mon doux, mon bel amour tu souris aux anges.

    © Charlène, le 17 mars 2009

     

     


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